Depuis quelques mois, nous entendons de nombreuses informations concordantes, il nous a semblé opportun de mettre en ligne une lettre que nous envoie un de nos amis helvètes qui, connaissant parfaitement les tenants et les aboutissants du dispositif exprime là son désarroi, nous la publions in extenso, en espérant que les autorités russes sauront en faire bon usage :

Lettre ouverte au Président de la Fédération de Russie


"Pourquoi votre Radio SPUTNIK est un échec total de votre Administration ?

Monsieur le Président de la Fédération de Russie,

Cher Vladimir Vladimirovitch,

Permettez-moi, au nom de tous les intellectuels occidentaux, désireux de connaître votre pays et grands amateurs des réformes que vous imposez à la Russie et au monde extérieur, de vous exprimer toute ma gratitude de nous avoir donné un nouveau souffle.
Il se trouve que nous autres, Occidentaux, reprenons de l’espoir en admirant comment vous réussissez à tenir la dragée haute aux Américains et autres faucons de l’OTAN. Votre discours munichois a sonné le glas de la pax americana et vous vous êtes montré intransigeant face aux agressions militaires, économiques et idéologiques de Washington, qui, depuis longtemps déjà, semble avoir perdu le cap. C’est à la même enseigne que je placerai, indubitablement, votre politique des contresanctions contribuant au développement de l’agroalimentaire national de la Russie (et je garde quelqu’espoir que la Suisse en serait épargnée). Nous admirons aussi le fin doigté propre à l’affaire « Mistral » qui, malheureusement, marque l’une des pages les plus noires, de loin, de la gouverne socialiste en France.
La raison qui m’a fait prendre la plume est cette guerre idéologique à laquelle vous vous dites engagé contre les manoeuvres perfides de Brzezinski et autres supporteurs de son « Grand Echiquier ». En docteur ès sciences sociales, j’ai décortiqué vos interviews où vous promettiez de répondre « de façon adéquate et équilibrée » aux incursions dans le domaine de l’idéologie nationale.  Et, ma foi, le renforcement de l’assistance que vous prêtez à l’Eglise Orthodoxe Russe et Sa Sainteté le Patriarche aussi bien que votre politique des réformes dans le domaine familial et scolaire prouvent l’efficacité et le bien-fondé de vos paroles.
Cependant, permettez-moi de le dire, Monsieur Le Président, votre politique dans le domaine de la présentation de votre pays à l’étranger est un flagrant exemple d’un cuisant échec que vous semblez subir à votre insu.
Il y a peu de temps, vous avez donné carte blanche à l’un des membres de votre Administration Présidentielle qui favorisa le projet de Margarita Simonian, rédactrice-en-chef de « Russia Today ». Ce projet vous a paru glorieux et plein d’allant parce que Mme Margarita bravait l’ennemi américain dans son antre, sur le sol national américain y créant la chaîne anglophone russe « Russia Today ». Je ne vous cacherai pas qu’à l’époque, beaucoup d’entre nous, membres du Club de l’Horloge, considéraient ce projet d’un très bon oeil. L’ennui est – et je le reconnais à mon corps défendant – que, par rapport à votre administration, les idéologues de Washington ont beaucoup plus de vécu dans ce domaine respectif. Les Américains sont de fins connaisseurs de ce que, à l’époque de Haushoffer et celle de Laurence d’Arabie, on surnomma « la guerre subversive  ou la méthode de noyautage». La méthode de cette guerre touche au domaine du renseignement idéologique. Elle fut peaufinée par le stratège chinois Sun Tzu bien avant notre époque historique.
Pour l’appliquer sur le terrain de « Russia Today », les Américains, guidés, très certainement, par M. Brzezinski, ont récupéré récemment votre manoeuvre de « Russia Today » lui redonnant un tout autre sens ou, comme on dit dans le milieu professionnel, en inversant le courant et vous faisant renvoyer l’ascenseur.
L’ennui est que la gent de Langley a vite fait de comprendre qu’il suffit d’utiliser Mme Simonian pour accéder à votre propre « sanctuaire » ou territoire souverain et inviolable comme on dit dans la dissuasion nucléaire. Et ils l’ont très bien réussi.
Après s’être fait nommer rédactrice-en-chef de « ROSSIYA SEGODNYA », premier consortium public médiatique de vote pays, Mme Simonian a réussi à s’émanciper de la férule de l’un des grands journalistes russes investis de votre confiance qu’est certainement Dimitri KISSILEV, directeur général de « ROSSIYA SEGODNYA ». Elle en a profité pour monter son projet qu’elle eût soutenu auprès de vos proches par l’entremise de son patron et ami au sein de votre administration.
Ce projet stipule qu’il faut combattre l’ennemi avec des pertes minimes et sur son propre sol. Vous l’eussiez avalisé parce qu’il vous serait proche par votre histoire nationale. Tel fut le slogan de Joseph STALINE, avant la Seconde Guerre Mondiale. Il se savait menacé par Adolf Hitler et il se préparait à une guerre-éclair sur le sol nazi au cas où la Russie se serait faite attaquer. On sait très bien que la politique de STALINE n’aboutit pas. La vôtre, bien malheureusement, non plus. La doctrine avalisée par vos proches voulait que des centres nationaux de « Voix de la Russie » soient créés à l’étranger. Que ces centres deviennent des têtes de pont de pénétration informatique de l’espace médiatique occidental. Le rôle dévolu au centre opérationnel se trouvant à Moscou serait minime se limitant au support administratif ou l’intendance logistique générale, si vous voulez.
Le plan a du talent et du feu sacré. Mais voici ce qu’il en fut en pratique. La rédactrice-en-chef de « ROSSIYA SEGODNYA » échappa à tout contrôle de la part de Dimitri KISSILEV, par trop occupé par le montage de ses émissions télévisées. Elle embaucha une équipe qui fit tout pour satisfaire aux demandes de leur vrai commanditaire, éventuellement la CIA.
C’est à ce moment-là, Monsieur Le Président, que votre plan eût été récupéré par des analystes brillantissimes de Langley qui, eux aussi, souvenons-nous-en, ne font que servir leur propre pays et le drapeau étoilé. Une fois aux commandes, les acolytes de Simonian se sont mis à limoger TOUTE l’équipe de la radio en langues étrangères de Moscou. Un organisme vieux de 85 ans de traditions se vit démantelé en un rien de temps. Plus d’un millier de personnes, à savoir toute l’équipe de journalistes de langues étrangères, se vit privée de ses responsabilités en l’espace d’un an et demi ! Du jamais vu pour les Occidentaux ! Cette période coïncide parfaitement avec le début des réformes de ce secteur lancé, hélas, sous votre égide et, à mon corps défendant, sous couvert de votre nom !
Les gens que Mme Simonian a mis en poste à la radio n’avait aucune maîtrise de ce secteur, aucune connaissance de la radio et, pour la plupart d’entre eux, une bien piètre connaissance des langues étrangères. Alexandra KOSTERINA, partie depuis peu pour travailler ailleurs, fut la première à organiser la curée. Placée à la tête de cette réforme sous le contrôle direct de sa proche amie Simonian, elle diminua immédiatement les effectifs des rédactions de langues étrangères, sans créer des pendants dans les succursales à l’étranger. C’est là où le bât blesse parce que cela prouve indiscutablement que les compétences ne firent pas transférées dans ces nouveaux centres opérationnels que vous vouliez créer sur le territoire de votre adversaire, mais tout bonnement perdues. Ce que l’on appelle en français « jeter l’enfant avec de l’eau du bain » ! Comme personne n’arrêta l’équipe opérationnelle ils continuèrent leur besogne.
Très vite ils ont dissout la chaîne de télévision par internet franco-russe ProRussia.tv qui fut une franche réussite de la Russie à l’étranger, bien connue en France, avec les « compteurs Google » affichant jusqu’à 1 Million de visites hebdomadaires, pour visualiser le Journal télévisé de cette chaîne. Son ancien directeur général Gilles Arnaud nous a avoué ne pas vraiment comprendre pourquoi un tel sort frappa le fleuron de broadcasting russe en UE. Aucune raison valable de cette dissolution ne fut avancée. L’équipe franco-russe qui anima les travaux de ProRussia fut définitivement dissoute il y a un an.
Ensuite, l’hallali final  fut lancé : disparition, comme je vous disais, de TOUS les journalistes émettant en langues étrangères de toutes les rédactions nationales, à commencer par la rédaction japonaise et chinoise (leur nouveau chef ne maîtrise aucune langue de secteur et ne connaît rien à l’Asie), jusqu’à la rédaction arabe confiée maintenant à une ancienne secrétaire de moins de 30 ans, sans connaissance sérieuse de la langue ni du terrain.
Croyez-moi, Monsieur Le Président, notre consternation fut totale. Mais le ballet continua de plus belle : tous les rédacteurs-en-chef des services nationaux et leurs adjoints remerciés ; journalistes sérieux et compétents de plus de 30 ans interdits d’antenne ; arrivée des gens sans diplômes, sans culture et connaissances linguistiques et très jeunes par-dessus le marché.
C’est ainsi que ces nouveaux gestionnaires ont fait disparaître tout le système de diffusion sur les pays de la CEI. Vous aviez un service approprié pour ces émissions-radio en langues étrangères. Et bien, ce service n’existe plus. Le hasard (ou peut-être pas) voulut que cette disparition tombe le mois où le Sénat américain a promis une prime de plusieurs centaines de milliers de dollars à celui qui ferait taire « La Voix de la Russie » en CEI. Force m’est de constater que les gens travaillant pour votre radio présidentielle l’ont fait. Je suis presque sûr qu’ils furent chaleureusement acclamés dans l’Outre-Atlantique et qu’ils touchèrent cette prime promise.
En même temps, on fanfaronnait sur l’ouverture des succursales à l’étranger. Sergey KOTCHETKOV, adjoint de Mme SIMONIAN, nous tint un beau discours à Berlin (j’y étais présent)  en promettant qu’il allait étonner tout le monde avec la succursale de Berlin qui compterait plus de 50 personnes et serait l’un des nouveaux centres de « Voix de la Russie » à l’étranger. La date butoir a été donnée par l’intéressé lui-même : octobre 2014. Je suis au regret de dire que non seulement aucun centre ne fut créé mais que, en plus, le service allemand à Moscou est déjà sur le point de disparaître en gardant juste sa composante internet à titre de journal d’actualités.
Le centre existant à Berlin est pour le moins... minable. Nous vous savons germanisant. Appréciez alors notre surprise à nous quand, le jour de la réunification de la Crimée, nous découvrîmes, ébahis, votre radio « Voix de la Russie » représentée à la télévision allemande par un petit jeune Ukrainien avec un allemand hésitant qui occupa  auparavant un poste technique subalterne la rédaction russe de Radio Berlin Brandenburg ! Les collègues allemands se sont mis à lui poser des questions en allemand littéraire. Le pauvre représentant de Stimme Russlands (mais Ukrainien de passeport) n’a même pas compris ce qu’on lui disait. Les Allemands en ont ri à gorge déployée. C’était aux heures de grande émission sur le sujet le plus brûlant d’actualité !
Les gens qui ont organisé le coup sont certainement des hommes de paille. Ils sont, comme on dit dans le milieu professionnel, « jetables ». C’est dire qu’on ne les utilise qu’une seule fois. Il se peut qu’ils ne savent même pas qui est le commanditaire final. Petits jeunes, pour la plupart d’entre eux (nous avons pris le soin d’analyser leurs biographies), ils cherchent à prendre du gallon, monter en grade. Ils ont peu de temps et convoitent les biens de la capitale. Le jour où ils disparaîtront, leurs propres chefs resteront toujours « intouchables ». Il va de soi que c’est à vous qu’il incombe de savoir comment et pourquoi vous faites telle ou telle manoeuvre, mais cette fois-ci votre opération idéologique a fait long feu.
En dernier lieu, je peux partager avec vous que les ondes courtes que l’ancienne « Voix de la Russie » (elle s’appelle maintenant S-PUT-NIK ce qui sonne de façon indécente en langue de Voltaire) privilégiait pour ses émissions, ont été elles aussi cédées par votre nouvelle équipe à... VOICE OF AMERICA !!! Amusant, non ? En Suisse, on nous enleva même les émissions de votre radio en version digitale que nous avions à Zurich.
Pour les émissions elles-mêmes, elles sont non seulement minables (pas de culture, pas de religion, pas de Russie, que le Journal d’Actualités zone B), mais aussi en très mauvaise langue quel que soit le pays. Il n’y a pas de quoi s’étonner, car, en fait, tout contrôle vous échappe. Vous vous êtes laissé berner par ceux qui ont maintenant honte d’avouer votre échec. C’est dire que Radio SPUTNIK dessert l’image de la Russie qu’elle défigure en plus à souhait.
Sa politique rédactionnelle est complètement assujettie au politiquement correct de Washington. Ce fut d’ailleurs le commentaire de l’un des premiers journalistes de langue française Thierry Meyssan.
Cependant, nous, intellectuels occidentaux, espérons bien revoir un jour une « VOIX DE LA RUSSIE » renaître de ses cendres : avec des émissions sur la Russie, avec commentaires des gens habilités et maîtrisant bien la langue, avec la religion et la culture dont nous sommes tant assoiffés chez nous, dans ce monde dit libéral.
Ne cédez pas, Monsieur Le Président ! Mettez au pas tous ceux qui se moquent de vous à vos dépens ! Vous qui avez fait revivre la nation russe et redoré le blason national, on vous en sait être bien capable ! On vous souhaite beaucoup de courage dans vos réformes et beaucoup de prospérité à votre pays ! »

Christopher POINTER

Genève 

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